Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Vie des Mots
11 décembre 2010

Nègre


      Quoique l'emploi de « nègre » soit souvent péjoratif, voire insultant, il n'est pas envisageable de condamner entièrement ce mot, et ses proches encore moins. D'ailleurs nul ne refuse de dire que la traite fut le fait de négriers, et la négritude elle-même fut chantée par d'illustres Noirs. Qui demanderait sans se ridiculiser que l'on débaptisât Nègrepelisse et le cap Nègre ?
       La courtoisie invite incontestablement à un effort d'imagination dans le cas où « nègre » désigne celui qui écrit anonymement un texte pour le compte d'autrui. Le mot traîne alors comme de la bonne conscience à l'égard de l'exploitation coloniale des populations africaines. Lui mettre des guillemets n'étant qu'un pis-aller, peut-être serait-il temps de renouveler l'art de l'allusion. Les matériaux ne manquent pas et permettent bien des nuances : porte-plume, scribe, valet,  tâcheron,  galérien, serf, soutier, esclave, mainmortable, hilote... Et n'hésitons pas à moderniser allègrement : infoserf, ordisclave, clavilote...

 

Publicité
Publicité
6 décembre 2010

Corporation


      « Corporation », accompagné d'une petite famille, pointe de plus en plus son nez avec un sens nouveau en français, celui de société, d'entreprise d'un certain poids, que lui donne la langue anglaise. On préfère société, notamment, lorsqu'il s'agit d'évoquer les actionnaires (la société distribue des dividendes) et entreprise pour évoquer plutôt les dirigeants (l'entreprise a une éthique). Corporation exprime bien l'idée organique que la société commerciale est comme un corps, dont les membres et organes divers concourent au bon fonctionnement du tout. Une place symbolique est ainsi reconnue aux employés, certes très allusivement, à côté des propriétaires et des dirigeants.
      Toutefois le sens traditionnel de corporation, en français, est celui de corps de métier. On sait que les métiers s'organisaient jadis en corporations et que la Révolution y mit fin. Sans même tenir compte de ce que le régime de Mussolini a prôné un « corporatisme » qui est autre chose encore, il appert que le risque de confusion est suffisant pour que soit rejetée la nouveauté paresseusement reprise de l'anglais. Multiplier pour un même mot des sens voisins appauvrit la langue. On compte sur l'honorable corporation des traducteurs pour travailler, au contraire, à l'enrichir.

 

Vie des Mots
Publicité
Derniers commentaires
Publicité