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Vie des Mots

26 octobre 2020

Large

     Il n’aura échappé à aucun observateur des mots que l’emploi de « large » est de plus en plus... largement répandu. Il n’est plus question que de « majorités larges », de pays « largement ensoleillés », voire de mesures « largement plus précises », etc., etc. L’influence de l’anglais est là hautement vraisemblable, du fait de la distorsion venant de ce que large y signifie ample, tandis que large y est rendu par wide.
     C’est ainsi que nous voyons « large » signifier grand dans n’importe quelle dimension, alors que, dans le jeu des métaphores spatiales, d’autres adjectifs conservent une spécialisation.
     « Long » s’emploie surtout pour le temps. On dit toujours une longue durée, un long temps, et même longtemps ; les décisions ne sont pas prises à une longue majorité. Ce sera long veut dire que ça prendra du temps. L’ambigüité apparente de « longue route » (tantôt selon l’espace, tantôt selon la durée) n’en est pas vraiment une puisque la durée du parcours est proportionnelle à sa longueur (pour une vitesse donnée, comme est celle du marcheur).
     Certains esprits sont dits épais, tandis que d’autres sont qualifiés de fins. Une intelligence est plus souvent profonde, tandis qu’un savoir est vaste ou ample.
      .

 

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25 janvier 2018

Data

 

      On lit, ici ou là, « les data », « la data », « les datas ». Il s’agit bien des données, matière première des échanges électroniques, sujettes à la quantification : des chiffres, des mots, des images, tout ce qui se laisse « numériser », binifier pourrait-on dire aussi.
      Il va de soi que, des trois tournures, seule est correcte la première, puisque data est le pluriel du neutre datum ; lequel signifie : ce qui est donné. Choisir le féminin et écrire « des data transmises », plutôt que transmis, tient à l’influence de données, Ce mot est mis au féminin en vertu de la tradition mathématique bien en place, qui veut que le féminin l’emporte souvent sur le masculin, comme avec variable, constante et inconnue. Les données d’un problème, dit-on couramment.
      Le pluriel s’est imposé (data et non datum) parce que les données informatiques sont en quantité, rarement isolées. La pratique langagière rejoint là celle qui concerne média, qui ne laisse aucune place à médium, et la double dérive ‘un média, des médias’ annonce que ‘une data’, et surtout ‘des datas’ ont quelques chances de s’imposer. Ces mots subissent en somme une délatinisation, phénomène de francisation peu respectueux des origines qui se produit aussi bien pour d’autres langues : des pizzas, des concertos, des ersatz, en place de pizze, concerti, Erzätze.

 

19 janvier 2018

Extra

 

     Un personnage ou un phénomène extraordinaire, c’est-à-dire sortant de l’ordinaire, peut ne pas exceller pour autant : un ambassadeur extraordinaire, ainsi désigné parce que ne relevant pas de l’organisation diplomatique ordinaire, n’est pas à l’abri de ses propres insuffisances. Malgré tout, l’inclinaison est forte de qualifier d’extraordinaire ce qui sort de l’ordinaire du côté de l’admirable. Si un extra est un serviteur (ou un contrat) occasionnel, c’est extra de pouvoir s’en offrir un !
     L’idée originelle d’extériorité se retrouve dans le préfixe « extra » employé ailleurs, et pas seulement chez les extraterrestres : une personne extralucide voit mieux que le commun dans la mesure où elle perçoit en dehors du champ de perception courant.
     Compte tenu de cet écartellement sémantique entre excellence et extériorité, la prudence s’impose dans la pratique de la vantardise : des œufs « extra-frais » sont, étymologiquement parlant, hors de leur période de fraicheur.

17 janvier 2018

Léthal

 

     L’adjectif létal, très employé dans le domaine militaire, est à peu près synonyme de mortel, au sens de : donnant la mort.

 

     La graphie ‘léthal’ pourrait passer pour un anglicisme du fait que l’on écrit ‘lethal’ en anglais. En fait les deux semblent provenir d’un hellénisme commis par la langue latine elle-même. Il se lit, en effet, que ‘lethum’ aurait été produit à tort, il y a quelque deux mille ans, à partir de l’antique terme letum (mort violente). Le ‘th’, de fantaisie en l’occurrence, correspond au thêta grec, qui se retrouve, en français, dans pathos, théatre, graphe, mathématiques et... thêta.

 

     La faute sur ’letal’ ayant été commise par la langue-mère, ce n’en est plus vraiment une. Tant d’eau a coulé depuis dans le lit du Léthé ! Il est donc permis de conclure que l’un et l’autre – létal et léthal – s’écrit ou s’écrivent ; l’orthographie n’en mourra pas.

 

  

5 août 2016

Offuscation

 

     Le contre-espionnage citoyen se développe activement dans le registre de l'offuscation, qui ne doit rien au cryptage.

     Offuscare est en latin une manière de dire cacher, obscurcir. Il en est venu le verbe (s')offusquer, qui a pris, entre autres, un sens moral dérivé dans lequel se mêlent surprise et comdamnation. L'offuscation est simplement, au départ, le fait de masquer, d'assombrir : en astronomie il est question de l'offuscation du Soleil. À ce titre il peut donc bien s'agir d'enfumage, de camouflage, de tout ce qui permet de brouiller le regard des espions. Dans le cas d'un système de surveillance de masse, le mot peut ainsi désigner toutes les tromperies que certains activistes se plaisent à pratiquer par la manipulation du sens.

     La graphie obfuscation, préférée en anglais, est une variante normale en latin, langue dans laquelle le phénomène de la double orthographe n'est pas rare: offuscare / obfuscare ; offuscatio / obfuscatio. La forme obfuscation pourrait donc très légitimement être réservée à la stratégie de brouillage, la forme offuscation restant attachée à l'idée morale.

 

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5 août 2016

Rêves d'ordinateurs

 

     Mettre un ordinateur au repos se dit le mettre en veille tandis que le mettre en sommeil se dit le mettre en veille prolongée. Drôle de conception du repos. L'ordinateur n'a-t-il donc pas le droit de rêver ?

     Ses deux Go de mémoire (vive) constituent en vérité une table de travail, que l'on débarrasse entièrement à chaque mise en sommeil profond. C'est donc la pire des mémoires, le contraire même d'une honnête mémoire. Les unités de stockage, pour leur part (disque dur, clef USB, etc.), sont comme des armoires. Leur aptitude à la longue conservation, une fois tout éteint, fait que ce sont elles les véritables mémoires, les réservoires à rêve.

 

4 août 2016

Pincettes

 

     Il est d'usage de placer entre guillemets les propos d'autrui que l'on cite directement. Les mêmes servent parfois à indiquer la distance prise avec le propos lui-même, ou du moins avec l'une des portions. Si un journal rapporte que le ministre de l'Instruction sera « impitoyable » sur l'orthographe des lycéens, chacun comprend que le journaliste se lave les mains des dires du ministre.

     Ce procédé peut s'appliquer à un seul mot, mais difficilement à une partie de mot. Si l'on désaprouve, par exemple, l'usage qui est fait du suffixe « phobe » pour traduire la haine dans « xénophobe », on ne peut pas se permettre la lourde graphie xéno«phobe». Une solution de compromis consiste à alléger les guillemets jusqu'à l'état de délicates pincettes : xéno'phobe' suffit à rappeler que la phobie n'est pas haineuse par nature, tout comme pédo'phile' permettrait de rappeler que l'affection pour les enfants étant l'une des choses du monde les mieux partagées, le mot ne devrait pas servir à désigner pédomanes et pédocriminels.

4 août 2016

Adréle

 

     L'envoi d'un message électronique ou d'un courrier électronique suppose une adresse à laquelle le destinataire trouvera ce mél ou ce courriél. Non moins électronique, cette adresse est donc une adréle. Ces mots fabriqués, porteurs de l'indispensable accent évocateur de l'électron, ne plaisent pas à tous ; c'est la loi du genre. Pour que le temps fasse son œuvre d'accoutumance, encore faut-il tenter de les lancer avec quelque insistance et un minimum d'arguments. Pour adréle on voudra bien noter que c'est au deuxième 'e' de « électronique » que l'on  doit d'office cette forme féminisée. Ni effort, ni mérite.

 

1 août 2016

Soja

 

    Comme nous sommes en Francosphère les sites traitant d'alimentation saine ne manquent pas d'ajouter à leurs bon conseils un grain de sel lexical. Ainsi peut-on apprendre sur certainsd'entre eux que le soja, à la grain et à l'huile réputées n'est pas le soja mais le soya, partout dans le monde, sauf en Allemagne, parce que l'écriture soja correspond là-bas à la prononciation soya. En français la prononciation erronée soja provient sans doute de l'orthographe allemande recopiée telle quelle. Il y a sûement des façons plus intelligentes de se distinguer du commun des nations. Écrivons dorénavant soya.

 

31 juillet 2016

Lapsus

 

    Lapsus, maintenant courant, fut d'abord savant, surtout suivi d'une indication de registre : linguæ (de la langue) ou calami (de la plume).

    La forme française existe depuis jolie heurette, mais sous forme adjectivale : lapse, relapse. Non loin de l'idée de lapsus est celle de dérapage. Est lapse, souvent, celui qui a chu pour avoir dérapé. Notrepresse attentive à dénoncer maint dérapages pourrait qualifier ainsi les « présumés coupables ».

    Deux mots manquent dans la famille : un pour désigner celui qui est lapse, un autre pour la chute elle-même. Pour celle-ci nous employons lapsus. Il est donc logique que celui (ou celle) qui dérape soit appelé(e) un lapse.

    Lapsus lui-même, dans une certaine tradition de notre langue, pourrait en outrese prononcer lapsu. La consonne finale choit facilement, comme il se voit un peu partout : poulet, bizut, inclus, etc. Ce ne serait en rien lapser que de prononcer élégamment lapsu.

 

31 juillet 2016

Monnaie

 

    Les débats sur la monnaie, qui atteignent un public de plus en plus vaste, donnent l'occasion d'observer un peu de désordre dans le vocabulaire des connaisseurs.

    Tous rappellent que la monnaie prit d'abord la forme métallique des lingots et des pièces, puis que furent inventés les billets. La monnaie-papier ne bénéficiant pas d'une réputation égale à celle des métaux précieux, fut qualifiée de fiduciaire, non pour dire qu'elle inspire confiance, mais qu'il lui faut l'inspirer pour assurer sa valeur.

    La monnaie de compte, pour sa part, consiste en écriture de crédits et de débits ; aussi est-elle à juste titre qualifiée de scripturale. On ne voit pas grand-monde la qualifier de fiduciaire, peut-être pour conjurer la crainte que la confiance ne lui soit pas tout acquise...

    Dernières nées, les monnaies électroniques intriguent ; l'origine privée de certaines leur vaut une curiosité soutenue. Or les présenter comme électroniques ne les caractérise pas vraiment. Celle de nos comptes bancaires, dite scipturale en souvenir de l'ère de l'encre, n'est ni plus ni moins électronique pour ce qui est de à sa matérialité. Et de même pour les porte-monnaie électroniques et autres cartes bancaires prépayées. Parler de monnaies numériques est une façon discutable de dire informatique, mais il est vrai que la monnaie de notre compte en banque est toujours dans un ordinateur ; le sien, pas le nôtre.

    Quant au terme plutôt journalistique de cash, [monnaie de] caisse en anglais, il s'observe qu'il s'agit des billets pour les particuliers (le liquide, les espèces). Pour les entreprises, grandes surtout, le cash c'est les liquidités, c'est-à-dire la monnaie disponible immédiatement ou presque, celle qui permet un investissement dans un délai rapproché.

    Tant la monnaie en papier et que les monnaies scripturales ont hérité de l'appellation « argent ».  On dit qu'on a ou que l'on veut de l'argent, pas de la monnaie ; sauf lorsqu'il s'agit de fournir ou d'obtenir l'appoint.

 

31 juillet 2016

Qui est-je ?

 

    « Je est un autre » disent poètes et psychanalystes. Sur la Toile nombre de sites nous le confirment quotidiennement. Allant sur ma messagerie je lis : « Connectez-vous », puis « Mon identifiant : ... », puis « Mon mot de passe : ... », puis « Mon espace », « Bonjour Francion », puis « Je donne mon avis... ».

    Je ne sais plus très bien si c'est moi qui ne sait plus très bien si... (etc., etc.). Je ne suis pas Devos. ai-je (?) envie de dire au système. Mais je (?) crains qu'il ne réponde « Alors tu es Raymond ».

    Cele inciterait à plaindre les petits enfants qui subissent stoïquement les incohérences du langage destructuré des adultes.

 

31 octobre 2014

Médicis

 

     Les paninis ont pour illustrissimes prédécesseurs les Médicis, en lignée orthographique s'entend. Il ne viendrait pas à l'idée d'un Florentin d'appeler autrement que Medici [méditchi] la glorieuse famille qui mit deux de ses filles sur le trône de France. Ajouter un 's' pour donner une allure de pluriel à un mot qui, de lui-même, se présente déjà comme un pluriel, n'est pas une marque de grand savoir. Prononcer ce 's', en outre, fait vaguement exotique, mais le bon sens y trouve encore moins son compte. Si l'on en faisait autant avec les paninis, la phonétique du français n'irait que de mal en pis.

 

13 juillet 2014

Ingénierie

 
     L'activité des ingénieurs s'appela le génie, et leur arme de même, laquelle fournit d'ingénieux engins à l'infanterie, à la cavalerie et à l'artillerie. Les civils ont aussi le génie informatique et le génie biologique.
    Pour la corporation dans son ensemble on a forgé « ingénierie ». L'obsession de faire parler les muets donne parfois la prononciation ingénieurie, parfois même avec cette orthographie, les deux ayant bien sûr pour elles de prolonger ingénieur. L'orthographie ingénierie s'imposant néanmoins, la prononciation de rigueur est ingéniri. Le génie des mots s'y laisse ainsi voir et entendre.

 

7 juillet 2014

Fleuves et rivières

 

    Les géographes nous apprennent à distinguer fleuves et rivières, les premiers, contrairement aux secondes, se jetant dans quelque océan ou quelque mer digne de ce nom.
    Un coup d'œil à l'étymologie laisse perplexe sur la question. Le fleuve est fondamentalement ce qui flue, ce qui présente un flux. Or les rivières n'en manquent pas. À l'inverse rivière a même origine que rivage. La rivière est ainsi nommée, paraît-il, parce qu'elle a des rives. Or on ne voit pas qu'un fleuve en manque.
    Un géographe a donc cru nécessaire de tordre deux mots dans le seul but de distinguer ce qui flue jusqu'à la mer de ce qui ne fait que confluer en amont de là. En est-on plus avancé ?

 

1 juillet 2014

Consultant

 

     Un malade qui consulte un médecin est, sans surprise, un de ses consultants. Or un esprit sain qui vient à l'aide d'un patron dont l'entreprise est plus ou moins malade est aussi appelé un consultant ; cela fait partie de ce vocabulaire destructuré du monde des affaires, qu'il serait manifestement malséant, dans ce milieu, de mettre en question. Le conseiller venu de l'extérieur ne consulte pourtant pas ; il est le consulté. Mais on sent bien que cet adjectif a quelque chose de trop passif pour définir une profession ou une fonction. On ne voit pas quelqu'un proposer ses services en tant que consulté, ni même comme consultable. Ce n'est pas une raison pour se présenter comme « consultant ». Et dire « un conseil », comme il se fait dans le domaine judiciaire pour un conseiller, n'est pas plus réussi. On attend mieux de tous ces gens instruits.

 

9 juin 2014

Lance

 

     Le regrettable changement de sens du mot lance ne date pas d'hier. Lancer une arme de jet à la main, tel un javelot, est une chose ; présenter un front de piques à la cavalerie ennemie en est une autre. Le seul rapport est l'usage d'une arme à pointe la plus longue possible dans le second cas. Il était raisonnable d'appeler javelot, ou lance, ce qui se jette sur l'ennemi et pique ce sur quoi il vient s'empaler tout seul.
     Comme un fantassin, un cavalier peut lancer quelque javeline et l'appeler une lance. Par contre appeler lance ce qui n'est en fait qu'une longue pique, comme firent les chevaliers du temps jadis, c'est manquer de logique. Quand un suzerain rassemblait quelques centaines de « lances » pour l'accompagner dans ses aventures, son ost ne comptait en réalité pas une seule lance digne de ce nom. On objectera peut-être qu'en matière de folie, on n'était sans doute pas à ça près.

 

16 février 2014

Contre-espionnage

 

     Des puissances étrangères auraient entrepris, à ce qu'il se dit, de nous espionner sous toutes les coutures. On conçoit que d'aucuns, en légitime défense, voire par pulsion de rétorsion (que l'on espère exempte de toute xénomisie), puissent chercher l’aide des lettres et des mots dans l’établissement de leur ordre ou désordre de bataille.
    Il est à craindre que les ordinateurs ne finissent toujours par venir à bout des procédés mécaniques de protection, tant stéganographiques que cryptographiques. Dans ce domaine le commun des mortels peut au mieux multiplier les petits jeux d'apparence, telle con cas sage. Considérons plutôt la nécessité que la machine passe la main à des humains pour ce qui est d'établir véritablement le sens et d'extraire des informations sûres. Afin de leur mâcher le travail au mieux, elle peut aller jusqu'à pourchasser les ambigüités. Dans « si nécessaire soit-il de prévenir des coups d'État ou, du moins, de les jauger, vouloir tout contrôler débouche sur la déception » un logiciel repèrera aisément trois termes ou expressions notoirement équivoques, de sorte que 2 2 2 combinaisons permettent déjà de proposer huit sens pour la phrase. Le neuvième et le dixième (sans parler de l'onzième) ne donneront pas moins de fil à retordre aux analystes. Plutôt que s'en prendre aux ordinateurs, ne serait-il donc pas plus efficace et plus amusant de viser directement l'intellect et le moral de ces espions, de travailler à peroccuper leurs samanches et à leur sublimer le ciboulot ?
     Différent du chiffrage, qui opère sur les lettres, est le codage. Un mot pour un autre ou une phrase pour une autre, selon une décision préalable et arbitraire, est une pratique éprouvée : messages de Radio-Londres, vers obscurs de poètes mystérieux, recettes de cuisine saugrenues, etc. De tout temps, d'ailleurs, l'argot, et pas seulement celui des malandrins, eut pour fin de n'être compris que de peu. Si la langue, dans son usage courant, peut certes s'en inspirer, il serait dommage de s'en contenter, car, pour ce qui est de perturber et d'enrager les indiscrets, ses vertus contorsionnistes ne demandent qu'à se déployer ; chacun connaît toutes sortes de procédés et de manières, qu’il suffit de cultiver en foule. L'intelligence suffisant aux glaucopides pour entendre, il est loisible de renouveler sans fin l'art universel de l'allusion ; de fournir de faux nombres par millions et par billions ; de pratiquer ellipses, paraboles et hyperboles ; ou, plus subtilement encore, de farfouiller dans le trésor des antiques et vénérables lettres guerrières. Xénomanes n'a-t-il pas dit on ne peut mieux ce qu'andouilles sont ?

 

25 décembre 2013

Majuscules des appellations

 

    Certain code typographique de l'édition et de la presse françaises impose que l'on écrive Premier ministre, et non Premier Ministre ; c'en serait trop de plus d'une majuscule. Le même principe semble à l'œuvre pour président de la République, de façon moins compréhensible encore. L'ensemble est quelque peu baroque.
    Dans bien des désignations mettre une majuscule à chaque mot important présente deux avantages, à l'exemple de l'ONU  : une écriture comme Organisation des Nations Unies offre une visibilité immédiate de l'ensemble, ainsi qu'une correspondance aisée avec le sigle. La souplesse est permise : écrire Groupe d'experts Intergouvernemental sur l'Évolution du Climat établit la correspondance avec le sigle GIEC ; et tant pis pour les experts. Cet usage des majuscules multiples est toutefois loin d'être majoritaire, il est vrai : on voit de plus en plus Assemblée nationale et Académie des sciences. L'héritière en France de l'Académie Royale des Sciences pourrait prendre exemple sur l'Académie royale des Sciences, des Langues et Beaux-Arts de Belgique, dont la majesté s'accomoderait même bien d'une septième majuscule.
    La règle de la majuscule pour la capitale d'un nom propre conduit toujours, pourtant, à en mettre une à chacun des composants d'une désignation propre. Une personne se nommant Marcus Tullius, son nom complet ne s'écrit pas Marcus tullius, et encore moins marcus Tullius. Semblablement écrit-on Jules César, alors même que le prénom de la personne évoquée est... [non, ce n'est pas Jules].
    En notre République, on n'est certes plus de l'Académie Françoise. Faut-il pour autant courir le risque de se retrouver un jour, platement, de l'académie française ?

 

9 décembre 2013

Annuaire

 

     Au temps du bon vieux temps des P.T.T., l'annuaire téléphonique était mis à la disposition des usagers chaque année, d'où son nom. Dans la migration sur Internet, le nom a accompagné la chose, au mépris de l'étymologie puisque le renouvellement du contenu s'opère désormais en permanence. Et c'est en foule que de prétendus annuaires se sont autorisés de cet exemple aussi déplorable qu'illustre.
     Un registre que l'on retouche jour après jour devrait s'appeler un quotidien ou un diaire ; en cas de renouvellement chaque minute, un minutaire. Mais qui osera proposer un millisecondaire ? Si l'on hésite devant un tel risque de dispersion, tout en rejetant annuaire, autant se rabattre sur quelque nom temporellement neutre, comme répertoire ou registre.

 

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