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Vie des Mots

18 mars 2008

Hein


       Nombre d'auditeurs se demandent pourquoi tant de journalistes, de politiciens et d'experts lardent leurs propos de multiples « hein ». L'explication qui circule depuis longtemps à ce sujet est qu'il s'agit de l'expression d'un effort répété. Un peu comme le bûcheron qui ahane à chaque coup porté au tronc, le compétent pousse ses « hein » de manière quasi physique, parce qu'il peine en travaillant à éclairer l'En-bas.
      Une nouvelle hypothèse est actuellement en faveur chez les observateurs : il s'agirait d'un concours. Les adeptes de la Compétance glissent ces « hein » en grande quantité parce que c'est la façon la plus naturelle de monter en grade dans ce qu'eux-même appellent, de plaisante façon, la tribu des Heins.
      Mais peut-être y a-t-il une explication meilleure encore.

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9 mars 2008

Deuxième et second


     « Second » nous est venu du latin. En plus, et contrairement à d'autres langues, le français a créé « deuxième ». Que faire de pareille richesse ?
     Il se répand comme règle, maintenant, de n'employer « second » que lorsque deux choses sont envisagées. Le Sénat est la seconde chambre du Parlement, tandis que mardi est le deuxième jour de la semaine. Cette contrainte n'existait pas en latin, bien évidemment, ni dans la longue tradition française qu'il a inspirée. Nos prédécesseurs ont employé surabondamment « second », que ce soit à propos de points de discussion, de raisons, de parties, de chapitres, de promenades de promeneur solitaire ou de méditations métaphysique. Mais cela doit-il empêcher les Modernes de donner aux mots un sens plus précis, alors que la possibilité s'en présente ?
     Il convient seulement de remarquer que constituer en règle le nouvel emploi de « second » produit ipso facto des exceptions. Primo, « deuxièmement » demande à être redoublé par « secondement », dont on guette en vain la survenue. Et secondement, la variante quelque peu pédante « secundo » appelle un « deuxio » qui existe, certes, mais réservé aux badineries de la langue familière.
 

29 février 2008

Billion


       En France, un billion est un million de millions, un trillion est un million de billions, un quadrillion est un million de trillions et ainsi de suite. Par ailleurs, de même qu'un milliard vaut mille millions, un billiard vaut mille billions, un trilliard vaut mille trillions et ainsi de suite. Pour aller de mille en mille on fait donc alterner les terminaisons : million, milliard, trillion, trilliard, etc.
      Aux États-Unis on va uniformément de mille en mille : un « billion » y vaut mille « millions », un « trillion » vaut mille « billions », et ainsi de suite. Ce système est incomparablement plus léger.
       Plus on aura affaire à des nombres de cette taille (en finance, en science, en informatique), plus la différence entre notre billion et le « billion » étatsunien sera source de confusion. Les Royaumuniens, nous dit-on, ont abandonné le premier système au profit du second. Peut-être serait-il sage de ménager semblable réforme.

 
13 février 2008

Oignon


      Ce n'est pas pour le plaisir de cultiver les exceptions que « oignon » se prononce ognon. Les érudits nous expliquent que, jadis, ce " i " n'avait pas pour fonction de produire le son oi. Il invitait à adoucir le " gn ", c'est-à-dire à le prononcer comme dans « gnon » et non comme dans « gnou ».
     La connaissance de cette règle s'étant perdue, « Montaigne » se prononce désormais montègne et non plus montagne. Certaines éditions des textes de Pascal restent fidèles à la prononciation d'origine en modernisant la forme : on y lit « Montagne
»
.
      « Oignon » est donc un rescapé. Pour « Montaigne » et quelques autres, l'aberration risque d'être difficile à corriger. Sauvons au moins « Saint-Aignan
».


27 janvier 2008

Mail


      Qui ne sait que le mot « mail » existe en français depuis plusieurs siècles, et qu'il se prononce maille, tout comme « épouvantail », « soupirail », « émail » et « rail » ? Ce dernier, aux lointaines origines françaises, nous est venu d'Angleterre avec le chemin de fer. La prononciation anglaise (essayons de la rendre par l'écriture réyl) a laissé la place à raille.
      Il est normal que « e-mail », pour sa part, soit prononcé à l'anglaise : iméyl. Dans ce contexte télématique, il s'offre un choix intéressant à qui préfèrerait employer « mail » plutôt que « e-mail » ou « courriel ».
a)  Maintenir la prononciation dans la langue de Shakespeare, Disney & Co : méyl.
b)  Se dispenser du grasseillement et prononcer mèl, comme il se fait pour « cocktail » ainsi que pour... « mailing ».
c)  Prononcer maille, comme on fait pour « rail ».


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2 janvier 2008

Libérisme


      Dans les débats relatifs au libéralisme, on ne sait pas toujours s'il est question de régime politique ou d'économie. On essaie de distinguer ces deux versants en désignant le second par « néolibéralisme » ou par « ultralibéralisme », sans que ce soit bien satisfaisant.
      Le français pourrait s'inspirer de l'italien, qui réserve
« liberalismo » au politique et emploie « liberismo » pour l'économique. Un libéral se dit « liberale » dans le premier cas, « liberista » dans le second. Rien de plus facile que d'employer libérisme pour désigner le libéralisme économique et libériste pour qui en est partisan.


23 décembre 2007

Arobase


    Les origines du mot « arobase » restent entourées de mystère. Il ne doit pas être difficile d'expliquer comment le symbole @ est arrivé sur les claviers. Mais quel était son sens auparavant ? S'est-il toujours appelé « arobase » ? Pour ce nom on a évoqué une origine espagnole ; pour la lecture « at » on a parlé d'usage commerial anglo-saxon ; et d'autres choses encore pour le graphisme. L'ensemble ne se tient guère.
      Une théorie récente voudrait que @ fût un "
 a " dans un " d " arrondi à l'ancienne. La préposition latine « ad » aurait été d'usage dans l'adressage diplomatique et le nom du symbole aurait été donné par nos typographes : a rond bas-de-casse. L'ensemble a le mérite de la cohérence et serait flatteur pour notre typographie. Mais ceci est une raison supplémentaire pour ne pas se contenter de rumeurs. Où sont les preuves ? Nous ne pouvons adhérer à cette théorie que si l'on nous montre :
–  des manuscrits anciens où l'adresse soit précédée du fameux
« ad » ;
–  des imprimés anciens où se voie le " @ " ;
–  des traités de typographie où se lise la désignation
« a rond bas-de-casse ».


18 décembre 2007

Suniens et Muniens


      Les habitants des Etats-Unis d'Amérique s'appellent les Américains et ils appellent Amérique leur grand pays. D'autres peuples du Nouveau Monde, sans doute envieux, se disent américains eux-aussi. Ils désignent de plus en plus souvent les précédents comme Etatsuniens. Ce mot vaut ce qu'il vaut ; au moins apporte-t-il une précision bien nécessaire.
      Tout à l'inverse, divers peuples du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord souffrent d'être appelés Anglais. Appelons-les donc tous Royaumuniens.
      L'abréviationomanie, qui a déjà donné le vilain "Ricains" ne devrait pas manquer de produire le pratique "Suniens" dans le premier cas et le sympathique "Muniens" dans le second. L'intérêt de "Sunien" est qu'il permet de se disputer à l'infini sur sa prononciation : çunien ou zunien ?


1 décembre 2007

Sémantique


      L'adjectif "sémantique" est un de ces mots savants tirés tardivement du grec et qui passent, sinon dans le discours commun, du moins dans les discours par lesquels on entend manifester sa culture. Encore convient-il de s'assurer préalablement que l'on a les plumes bien plantées.
       Or "sémantique" est parfois employé à la place de "lexical". Si "gifle" vient à être remplacé par "claque", il y a changement lexical : un élément du lexique, c'est-à-dire du stock des mots disponibles dans la langue, est substitué à un autre ; et cela ne s'accompagne pas pour autant d'un changement de sens perceptible. En revanche, si "gifle" était remplacé par "tarte" ou par "mornifle", le changement lexical s'accompagnerait, il est vrai, d'un certain changement sémantique.
      Morale : employer improprement "sémantique" constitue un dérapage sémantique.


20 novembre 2007

Autrice


      Cherchez l'intrus : " La directrice, telle une présentatrice, resta simple spectatrice dans le débat qui opposa la traductrice et l'auteure ".
      On pourrait craindre qu'il ne soit trop tard pour que "autrice" vienne à être utilisé comme féminin de "auteur". Or l'expérience montre qu'il suffit de s'y mettre. Différents appuis peuvent d'ailleurs être cherchés outr'Alpes : autore, autrice y dit-on maintenant ; et cela parce que l'on y disait jadis auctor, auctrix.
      Compte tenu de l'origine latine, "auteure" est illogique, tout comme le serait "traducteure" ou "présentateur". Laisserons-nous le haut du pavé aux illogiciens et aux illogiciennes ?


5 novembre 2007

Contrôler


      "Contrôler" veut dire, fondamentalement, vérifier en procédant à une comparaison (par l'usage d'un contre-rôle, initialement). Lors du contrôle d'une carte grise, ses mentions sont comparées au véhicule ; et l'on réalise le contrôle d'un produit en comparant ses qualités effectives à une norme.
      L'anglais a élargi le sens, pour ce verbe et pour le nom associé, à l'idée de maîtrise, comme dans "self-control", et cet usage nous est revenu par le biais de traductions bâclées. Au contrôle de soi se sont ajoutés le contrôle des changes et le contrôle des naissances ; et une armée d'occupation est réputée contrôler un territoire.
      Faut-il s'en accomoder ? L'emploi de "contrôle" à l'anglaise correspond rarement à un besoin véritable. On peut faire preuve de maîtrise de soi, on peut réguler les naissances, on peut dominer ou tenir un territoire.
      L'emploi relâché ne débouche donc que sur un appauvrissement de la langue. Afin de préserver nos richesses, contrôlons les auteurs et les journalistes !


3 novembre 2007

Première ministre


      A ce jour, lorsqu'un premier ministre est une femme, nul n'ose dire "la première ministre", alors que, par ailleurs, on n'hésite plus à employer "ministre" au féminin. Lorsqu'un roi est une femme, pourtant, on trouve normal de l'appeler "la reine".
      Il s'observe là une de ces réticences qui, dans une société comme la nôtre, ne peuvent que finir par tomber. Combien de temps celle-ci tiendra-t-elle ? Les paris sont ouverts.


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