Paradigme
Paradigme est un mot savant qui s'efforce d'entrer dans le
vocabulaire courant. Savoir ce qu'il signifie est cependant de moins
en moins aisé.
Les grammairiens y firent appel pour désigner les modèles de
conjugaison et de déclinaison. En français on apprend la première
conjugaison avec chanter, ou avec aimer ; en latin on décline rosa,
rosa, rosam... Un paradigme, en ce sens, est simplement un exemple
servant de modèle.
Assez récemment des philosophes ont attaché le mot à l'idée que
les savants font progresser leur discipline à l'intérieur d'un
certain cadre de pensée fait de concepts majeurs, de principes, de
méthodes de recherche bien établies. Un modèle illustre sert alors
de référence, par exemple la découverte par Newton de la
gravitation universelle ; mais c'est le cadre de pensée lui-même,
plutôt que le modèle, qui est alors appelé paradigme. Il arrive
qu'une science, ayant épuisé les vertus d'un modèle, soit conduite
à changer le « paradigme » qui organise ses travaux.
Cette notion épistémologique est évidemment moins nette, moins
précise que celle des grammairiens.
À
partir de là, le mot a été employé très librement par moult
penseurs et commentateurs dans les domaines du politique, du social
ou de l'économique. Il sert à exprimer une plus ou moins vague idée
de manière de concevoir les choses, pourvu qu'elle ait quelque
valeur de référence et généralement avec le sous-entendu qu'il
est envisageable d'en changer. On parlera du paradigme du capitalisme
fordien ou, tout aussi bien, de celui de la filiation patrilinéaire.
Incontestablement la présence du mot donne du poids au propos.