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Vie des Mots
23 septembre 2010

Cheffe


      La féminisation de chef s'est trop longtemps limitée à cheftaine, venu de cheftain. Ce dernier ayant complètement disparu, reste un couple chef / cheftaine bancal et peu utilisable.
      Il semblerait que cheffesse ait un certain succès dans des sociétés que l'on pourrait dire coutumières. On croit peut-être prolonger ainsi la série comtesse, duchesse, princesse ; à moins que ce ne soit la série prêtresse, abbesse, papesse. D'autres féminins de ce style sont bien établis : poétesse, tigresse, bougresse. Mais l'échec de doctoresse invite à ne plus tenter d'abuser du procédé : il convient surtout aux cas où le masculin se termine par un e : comte, pape, poète.
      En Suisse, on paraît avoir opté résolument pour cheffe. Ce choix étant simple et de bon sens, suivons donc en cela, sans plus hésiter, les Suisses et les Suissesses.

 

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16 septembre 2010

i & j


      Les numérotations écrites se font usuellement en chiffres arabes. Néanmoins, depuis que l'on imprime des livres, les chiffres romains ont souvent été mis à contribution, que ce soit pour les tomes, pour les chapitres ou pour des pages à part, celles de l'introduction par exemple. Les chiffres romains prennent alors leur forme classique (I, II, III, IV, ... ), mais il peut leur arriver d'être écrits en minuscules (i, ii, iii, iv, ...). Dans ce cas, on peut même rencontrer j, ij, iij, iv, v, vj, vij, ... , où se voit qu'un i final devient systématiquement un j. Ce remplacement, purement ornemental, n'a aucune signification numérique. Au chapitre dixième de la Vie très horrificque du grand Gargantua père de Pantagruel, livres saints et chapitres sont évoqués dans ce style. Le quatre y est même écrit iiij, ce qui invite à penser que les horlogers n'ont pas toujours été les seuls à préférer à IIII à IV.

 

9 septembre 2010

Week-end


      Refaire aujourd'hui le procès de « week-end » serait sûrement vain, alors qu'il triomphe insolemment. L'instruction ne s'en poursuivra pas moins pour autant.
      Maintenir cette expression en francisant sa seule écriture n'est guère satisfaisant. Si gazole se justifie et passe bien, on ne peut pas en dire autant de ouiquende.
      La traduction mot à mot n'est pas toujours appropriée non plus. On peut partir en fin de semaine, comme on part en fin de mois ; il s'agit là d'une simple indication temporelle. Mais on ne va pas dire que l'on part en fin de semaine si l'on entend faire miroiter la goguette qu'inspire ce projet. Il y faut une tournure particulière et « partir en week-end » sert surtout à cela. Dans cet usage, le week-end c'est en quelque sorte des vacancettes. Les évoquer sous l'appellation de fin serait effectivement malvenu ; elles constituent une autre part de la vie, censément la meilleure.
      Saluons en passant les tentatives de création astucieuses, comme samanche ; ou se voulant telles, comme maine. Il en faudrait sans doute plus pour faire valoir que l'on sait profiter joyeusement de ses fins de semaine. Un jour, peut-être, quelque arbitre des modes aura l'intuition juste, dans une conjoncture faste.
       En attendant, contentons-nous de relever un petit problème grammatical à placer lors d'un repas du dimanche. Composé de deux mots dont les équivalents français sont féminins (fin et semaine), week-end est lui-même masculin. Il serait difficile de soutenir que « end », parce que neutre en anglais, serait plutôt masculin en français. Car même si l'on prétendait s'appuyer là sur une règle, celle-ci ne pourrait pas ne pas avoir d'exceptions. Or le cas qui nous occupe en constituerait clairement une puisque nombre d'amateurs de cinématographie parlent d' « une happy end ». Ne conviendrait-il pas de les suivre en disant « la week-end » ?

 

4 septembre 2010

Q


      Contrairement à d'autres, la consonne Q ne coule pas des siècles paisibles.
      Le U qui la suit fut longtemps obligatoire. Cela allait de soit en latin : le numéral cinq s'y écrit quinque, ce qui se prononce kwin'kwé. Cet accompagnement impératif n'empêchait pas de mettre Q seul à l'honneur. Dans la sobre devise S.P.Q.R., il figure à égalité avec S, P et R, alors que lui-même n'est pas vraiment l'initiale d'un mot : SENATUS POPULUSQUE ROMANUS, où « que » est collé à « populus », est une tournure d'usage bien établi pour dire « le Sénat Et le Peuple Romains ».
      La tendance historique du français à alléger les fins des mots a produit cinq à partir de quinque (cinque en italien). Le U, inutile du fait de l'absence du E final, disparut avec lui en cette occasion. Son absence ne peut s'expliquer de la même façon  pour la graphie Iraq, qui n'est en rien l'abrégée d'une forme latine : il s'agit d'un emploi de Q inventé pour transcrire des mots venus d'un certain Orient. Si le français préfère encore Irak, la forme Qatar, pour sa part, a tendance à s'imposer sur Katar. Faut-il donc préférer bourqa à bourka, ou l'inverse ?
      Non contente d'avoir trouvé l'occasion d'évacuer le traditionnel U, la modernité s'attaque aussi à la prononciation de Q. Dans le pinyin, qui est l'écriture du chinois en alphabet latin, cette lettre se prononce ch. Le nom de dynastie Qing se dit Ching, ou encore Tsing, et fut longtemps écrit ainsi chez nous ; et semblablement pour le célèbre empereur Qin. Bref, Q est ici un ch adouci.
      Qui peut dire que les aventures de cette consonne s'arrêteront là ? Il est notable, en tout cas, qu'une partie de ces évolutions (celle de quinque devenant cinq) relève sans doute de la force de l'usage chez nos lointains prédécesseurs, tandis que les autres (Qatar, Qing) résultent de choix se voulant éclairés.

 

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